Mode d'élaboration.
Compte tenu de l'enjeu historique que représente la rédaction d'une Constitution pour l'Europe, la démocratie la plus élémentaire exigeait au minimum :
- un débat public préalable dans tous les pays de l'Union
- l'élection de représentants à une Convention chargée de rédiger un projet
- on pouvait aussi convenir qu'a l'issue du débat public, c'est le Parlement élu qui serait chargé de rédiger le projet
- enfin le projet serait soumis à la ratification populaire de la Constitution le même jour dans tous les pays de l'Union
Au total ce que l'on nous propose n'est rien d"autre qu'un nouveau traité international concocté par les gouvernants sans le moindre débat public, sans la consulation des peuples et qui sera finalement ratifiés dans la plupart des pays sans aucune consultation populaire !
Un contenu anti-démocratique
Le minimum de la démocratie, c'est quoi ? C'est le fait que le peuple par son vote et par la désignation de représentants peut déterminer l'orientation des politiques. Or dans la Constitution que l'on nous propose, les réprésentants ne peuvent même pas proposer une loi ! L'initiative des lois appartient à la Commission.
Les décisions et les lois européennes sur les questions essentielles (fiscalité, politiques sociales, politique étrangère,...) supposent l'accord unanime des gouvernements. Cela veut dire que si les citoyens européens envoient une majorité à 80% de gauche ou de droite, il suffit d'un seul gouvernement opposé à cette majorité pour bloquer une poltique voulue par l'immense majorité des citoyens.
Même si les institutions étaient parfaitement démocratiques (un Parlement de gauche/droite implique une Commission de gauche/droite qui applique à la majorité un programme de gauche/droite), cette Constitution ne serait pas démocratique. En effet il faudrait aussi que la Commission et le Parlement européen aient le droit de mettre en oeuvre le programme politique validé par les électeurs. C'est normalement le cas dans toutes les Constitutions démocratiques car une Constitution ne fixe que les règles du jeu politique et non le contenu du jeu lui-même, elle dicte les conditions dans lesquelles un gouvernement accède au pouvoir, mais elle ne dicte pas l'orientation politique que doit suivre le gouvernement.
Or la pseudo Constitution européenne détermine précisément l'orientation des politiques européennes. Elle n'autorise que les politiques qui introduisent plus de concurrence, qui réduisent les impôts et la part des biens publics, qui abaissent le niveau de protection sociale ou des salaires, etc. Elle interdit par exemple l'harmonisation du droit social par le haut et interdit la prescription d'une législation sur le salaire minimum dans tous les Etats membres (art 210). Elle interdit le recours à la politique monétaire puisque celle-ci est confiée à la seule banque centrale. Qui plus est cette Banque centrale n'a elle-même pas le droit de mener une autre politique que la politique néolibérale donnant la priorité à la stabilité des prix sur tous les autres objectifs de la politique économique (croissance, emploi...).
Bref, en fait de Constitution démocratique, c'est une Constitution qui limite a priori le champ des politiques possibles aux seules politiques néolibérales visant l'extension infinie de la sphère marchande et interdisant toute régulation des marchés au nom de finalités sociales.
Une procédure de révision anti-démocratique
Dans toutes les démocraties du monde, la Constitution peut-être révisée à la majorité ou à la majorité qualifiée. La Constitution européenne est révisable à la triple unanimité d'une Convention préparatoire, du Conseil des chefs d'Etats et de gouvernement et enfin de l'ensemble des pays membres (par les parlements ou par référendum). Autant dire qu'à 25 et bientôt 27 puis 30 pays elle est de fait non révisable. Cela revient à imposer aux générations futures, pour des décennies, le compromis politique particulier établi en 2005 !
Face à ce constat implacable, la réplique habituelle des partisans du oui consiste à dire ceci : vous commettez l'erreur de vouloir appliquer à une Union d'Etat la logique démocratique qui s'applique dans un pays particulier. Une union d'Etats indépendants ne peut pas se donner une Constitution démocratique semblable à celle d'un pays, car il est nécessaire d'obtenir l'accord unanime des Etats sur les questions essentielles, sinon ils ne sont plus indépendants et deviennent de simples régions ou états fédérés dans un Etat fédéral européen dont personne ne veut.
Autrement dit ils reconnaissent que ce texte n'est pas une vraie Constitution mais seulement un nouveau traité international. Ils reconnaissent qu'ils ne veulent pas d'une véritable démocratie européenne où, sur les seuls domaines de compétence reconnnues à l'Union, la décision reflèterait la volonté majoritaire des citoyens européens. Ils reconnaissent qu'ils ne veulent pas d'une Union politique de l'Europe. Ce sont pourtant les mêmes qui avec la plus insolente duplicité vous demandent de ratifier ce texte parce qu'une Constitution européenne constitue une avancée historique pour l'Europe, un grand progrès pour la démocratie, etc.
Pour faire court, je n'ai bien évidemment proposé ici qu'une toute petite partie des raisons et des preuves qui fondent la première de mes quatres affirmations, je vous renvoie au livre si vous avez besoin de l'argumentaire complet.
A SUIVRE....
Voir aussi "Huit bonnes raisons de dire "non" à la Constitution".
Voir aussi "Au nom de l'Europe c'est non!"
Téléchargez la Constitution européenne
par Ploum, le Lundi 2 Mai 2005, 18:25