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Discours au meeting de lancement du Parti de Gauche.

Saint-Ouen - 29 nov.2008

Par Jacques Généreux • Parti de Gauche-Socialisme • Dimanche 30/11/2008 • 11 commentaires • Version imprimable

Mes chers Camarades,

 

Voilà bien longtemps que je n’étais monté à la tribune de mon parti avec la certitude de n’avoir dans l’auditoire que des compagnons de route, et aucun adversaire. Cette certitude, bien nouvelle pour qui vient de quitter le PS, va nous permettre désormais d’être bien moins occupés à nous convaincre nous-mêmes qu’à nous adresser enfin aux Français. Alors, pour profiter aussitôt de ce changement de perspective – et vous m’en excuserez chers camarades – je voudrais dès aujourd’hui m’adresser plutôt à nos concitoyens qui nous regardent ou nous écoutent en ce moment.

 

Mes chers concitoyens,

 

À moins que vous n’apparteniez à cette infime minorité qui profite ou se réjouis du malheur des autres, vous savez bien que notre société va mal.

 

Vous savez bien que les prétendues vertus de la libre compétition, du libre échange, de la déréglementation dégénèrent en guerre économique générale qui se solde toujours par les crises financières, les crises économiques dont vous tous payez finalement le prix.

 

Vous savez bien qu’un système entièrement voué à la maximisation de la seule rentabilité des capitaux ne peut pas se développer dans l’intérêt général.

 

Vous savez bien qu’en réduisant les services publics et sociaux, pour redistribuer l’argent public aux plus riches, on ne prépare pas un meilleur avenir pour nos enfants, mais une société brutale d’individus dressés les uns contre les autres.

 

Vous savez bien qu’au nom de la compétition, on vous demande toujours plus d’effort au travail, et le sacrifice de votre temps libre, de votre vie de famille, de votre santé, qu’au nom de la compétitivité, ce capitalisme brutal, après trois siècles de « progrès » économique tue aujourd’hui encore, oui, je dis bien tue des ouvriers au travail.

 

Vous savez bien que cette compétition effrénée pour produire toujours plus, au profit de quelques uns, est en train de détruire notre écosystème et nous empêchera de léguer à nos enfants un monde simplement vivable.

 

Vous savez bien qu’on ne surmontera pas la violence juvénile en construisant toujours plus de prisons pour nos enfants, au lieu de leur construire des centres de loisir et des logements, au lieu d’investir dans leur éducation, dans leur encadrement par des adultes plus nombreux et formés à cet effet.

 

Comment puis-je savoir qu’une large majorité d’entre vous sait bien tout cela ? Mais, tout simplement parce que vous n’avez cessé de l’exprimer par le vote.

 

À chaque fois que le PS vous a tenu ce discours de gauche, cette promesse d’une opposition sans faille à la régression sociale, à la société du fric et de la compétition, vous avez fait un triomphe aux candidats socialistes. Mais quand ces candidats vous disent, en 2002, que leur « projet n’est pas socialiste », en 2005, qu’ils sont d’accord avec la droite pour l’Europe de la libre concurrence, en 2007, que leur premier ministre idéal serait François Bayrou, et non une femme ou un homme de gauche, alors, à chaque fois, vous avez fui ces « socialistes » qui renoncent à mettre en œuvre votre aspiration à une société plus solidaire.

 

Malheureusement, partout en Europe, les socialistes et les socio-démocrates ont affiché ce même renoncement et, dès lors,  presque partout ils ont été chassés du pouvoir. Ce n’est pas que les peuples soient passés dans l’autre camp ; c’est qu’ils ont le sentiment que la gauche est passée dans l’autre camp, qu’elle n’est plus à leur côté pour défendre leur soif de progrès.

 

Parfois, la social-démocratie s’est purement et simplement convertie aux valeurs et aux politiques de la droite. En France, la situation du PS est moins tranchée. De vrais socialistes - dont nous fûmes avec Jean-Luc Mélenchon, Marc Dolez et beaucoup d’autres - ont fait de la résistance mais sont toujours restés minoritaires. Dans les directions majoritaires, au mieux, il nous reste des socialistes qui conservent des velléités critiques à l’égard du capitalisme et du néolibéralisme. Mais, au nom d’un prétendu « réalisme » ils restent verrouillés par leur conversion à la libre concurrence, au nom de leur « identité européenne », ils refusent de mener le combat pour la réorientation de l’Union européenne qui est devenue le premier temple du culte destructeur des marchés libres.

 

Ce verrou là commande tout le reste. Les plus beaux discours de gauche, ne sont qu’illusion ou tromperie, si l’on renonce à limiter la concurrence et le libre échange pour faire prévaloir la coopération des nations, pour préserver les services publics, pour en finir avec le dumping fiscal et le dumping social.

 

C’est pourquoi, après avoir tenté, des années durant, de faire sauter ce verrou au PS, et parce que nous constatons notre impuissance à le faire sauter par le vote des militants, nous allons le faire exploser par le vote du peuple, dès les prochaines élections européennes. Nous ne prétendons pas le faire seul, mais avec toutes les autres forces de gauche résolue à mener ce combat.

 

Alors je sais bien que les distributeurs patentés en label de modernité (qui ignorent d’ailleurs le sens même de ce terme), vont nous dire que nous cherchons nos alliances dans de bien vieilles familles politiques. Mais les esprits cultivés savent bien que presque toutes les idées du monde, sont vieilles comme le monde. L’important est de savoir faire le tri entre les idées fausses et les idées justes.

 

La sagesse populaire nous dit d’ailleurs que c’est dans les vieux pots que l’on prépare les meilleures soupes. Et notre bon sens politique ajoute que si nous voulons préparer une soupe de gauche, mieux vaut la faire mijoter dans un pot de gauche avec des chefs de gauche. D’autres ont choisi le vieux pot de la social-démocratie européenne. Et ce n’est pas sa vieillesse qui nous dérange, mais sa fragilité face aux vents de l’histoire ; il s’est fêlé de toute part face à la crise économique des années 1970, face à l’offensive néolibérale des années 1980 et devant le défi d’une réunification de l’Europe, après la chute du mur de Berlin. Alors le voilà ouvert à tous les courants d’airs, et c’est sans doute pourquoi nos élites social-démocrates semblent n’avoir plus que « l’ambition des feuilles mortes », qui, disait Milan Kundera,  « est d’aller dans le sens du vent ».

 

Eh bien, pour nous, la seule ambition vraiment moderne, n’est pas d’aller dans le sens du vent, elle est de guider le vent par le souffle de la parole et de l’action politique.

 

Pour conclure, mes chers concitoyens, je vous annonce la bonne nouvelle de ce jour :

Vous n’êtes plus orphelins d’une représentation politique. Avec un parti tout simplement « de gauche », un parti uni dans un front commun avec les autres forces de gauche qui veulent reprendre le chemin du progrès social, vous savez désormais que, dès le mois de juin, vous pourrez vraiment faire entendre votre désir d’une société meilleure, d’une république sociale, laïque et vraiment démocratique, d’un monde tout simplement humain.

 

Commentaires

Bravo par Yasârî le Dimanche 30/11/2008 à 14:36

Bonjour,

Bravo pour cette prise de position claire et cohérente. Pendant des années, je me suis demandé quand émergerait ce parti qui oserait parler de nationalisations, de redistribution et de justice sociale à la fois sans complexe et sans s'enfermer dans une posture de rebelles romantiques.

Vous avez tous répondu à cet espoir hier.

Merci


Bravo, entièrement d'accord par Brunet le Dimanche 30/11/2008 à 16:35

Bravo,  entièrement d'accord dirais-je, mais depuis 1981 si l'espoir a souvent été suscité il a, objectivement sur le long terme, toujours été déçu.
Vous et JL Mélanchon décrivez bien cette longue pente glissante qui en 30 ans a mené le parti socialiste de la gauche au centre ; vous le dénoncez, c'est très bien mais je pense qu'il va falloir un certain temps aux millions de personnes qui sont de votre avis exprimé ici pour croire que celui-ci n'est pas de circonstance.
S'il s'avère durable et fiable, lorsque les électeurs (dont moi) auront repris confiance dans la Politique,
je pense que ce sera un très grand succés......et ça ce serait beau!
Je nous le souhaite
Avec mes salutations, mes espoirs, il est grand temps!
P.Brunet


Enfin par Michel G le Lundi 01/12/2008 à 11:40

Un discours attendu depuis tres longtemps. Je sais déja pour qui voter aux elections Europeenes.Bonne chance!


par Zorro le Lundi 01/12/2008 à 22:05

Enfin!


Re: par tr td img src= logo.jpg /td /tr le Mardi 14/04/2009 à 10:24


Re: par tr td style= font-size: 8pt Date Created: Sun Apr 5 15:58:19 2009 /td /tr le Mardi 14/04/2009 à 11:39


Re: par Natashabup le Lundi 23/01/2012 à 08:17

Ou telecharger gratuitement X Rumer 7.0.10 ??
Envoyez-moi s'il vous plait URL!!!


Bravo! par Paul du 59 le Mardi 02/12/2008 à 08:00

Un discours simple, clair que je m'empresse de relayer...

Il etait temps que la gauche se réveille, que les discours de Jaurès, Blum et tant d'autres reviennent sur le devant de la scène.

Non le socialisme n'est pas une "langue morte", une idée poussièreuse, le socialisme est un avenir !


Et maintenant, que vais-je faire ? par thierry le Mardi 02/12/2008 à 08:52

Bonjour Mr Généreux,
Bravo pour votre discours que j'ai eu l'occasion d'écouter en live. Ce fut un meeting réussi.
J'ai néanmoins 2 critiques à vous faire.
Tout d'abord, lors de la campagne pour le NON en 2004-2005, je vous avais posé sur votre blog une question de néophyte (dans le domaine économique)... et vous n'avez jamais répondu. Je dois admettre, pour m'être documenté depuis, qu'elle n'en valait vraiment pas la peine !!! et vous deviez alors être un peu débordé !!!
Plus sérieusement, j'ai adhéré au PS après la royale défaite aux dernières présidentielles, en espérant que cela serait l'occasion d'une prise de conscience dans ce parti de la dérive idéologique délétère sous la houlette de François Hollande. Malheureusement, la modification de la déclaration de principes dans un sens toujours plus libéral (une capitulation ?), pendant que la crise des subprime avait éclaté et menaçait d'emporter tout le système financier ; la foire d'empoigne des motions, avec en fin de compte la victoire du duo Royal-Hollande (qui à eux deux, dépassent les 50 %), suivie de la lutte entre une socio-libérale et une socio-démocrate avec comme probable conséquence la marginalisation de cette frange socialiste que vous représentez... n'ont plus rendu ce PS attractif (c'est un euphémisme). Il est vrai qu'en 2007, il ne semblait pas y avoir de choix à gauche : une gauche "responsable" au PS, ou une gauche "irresponsable" (PC, LCR...).
Gageons qu'avec ce nouveau parti, une alternative intéressante et responsable soit apparue... Mais vous me permettrez de voir un peu avant de m'y engager plus avant !!!
Bonne chance, et peut-être à bientôt...
Thierry


Re: Et maintenant, que vais-je faire ? par J-Genereux le Lundi 08/12/2008 à 02:48

Pardon de ne pas vous avoir répondu en 2005... aux plus beaux jours de cette bataille il y avait 2000 visiteurs sur mon site et des dizaines de messages. et j'étais en campagne dans toute la France, tout en ayant en même temps un métier... et besoin de juste quelques heures de sommeil. Mais quel beau résultat... hélas piétiné comme un non événement par N. Sarkozy.
Le meilleur moyen de peser sur ce qui se passe dans un parti, hormis le vote, c'est d'y militer... aussi n'attendez pas trop longtemps. Nous avons besoin de vous, de toi, cher ex-camarade et futur aussi je l'espère.


Ça fait plaisir à lire par Vania le Mardi 02/12/2008 à 10:53

C'est agréable de voir quelqu'un ayant le courage de ses opinions et de ses engagements, prêts à se lancer quand bien même cela obère ses chances de "faire carrière" en politique en trouvant des postes rémunérés et sûrs en chemin.

Et vu que j'adhère peu ou prou à ces idées, hé bien, mes félicitations !

Salutations de la part d'un ancien élève à Sciences-Po, qui se rappelle encore avec émotion vos doubles courbes,

Vania



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